LA MAISON M

La Maison M restaurant Sénas – Ne vous laissez pas abuser par la devanture de cette ex-boulangerie au cœur de ville. La jolie terrasse fait de sacrés efforts pourtant, mais les reflexes gouvernent parfois nos vies et pourraient laisser croire à un énième restaurant confit dans sa banalité culinaire. Or dans La Maison M officie un certain Matthieu Matheron, jeune quadra pas piqué des hannetons point de vue CV et ténacité.

Les malins pressés du midi en semaine s’injectent du plaisir dans le tiroir avec la formule 16€ et le menu à 19€ avec choix mes petits anchois. Le week-end, toujours une cuisine intégrale de produits bruts et frais mais autre registre: on vire du traditionnel au gastronomique, et pas du comique, Monique. Aucun surgelé et rien d’industriel, autant dire le cauchemar des VRP de produits « tout prêts ». Des voisins lève-tôt m’ont dit avoir parfois vu dès potron-minet des poireaux et des haricots venir jusqu’ici à pied. Blague à part, cuisinier sacrément fortiche (c’est un dogmatique sain) et il vous en coûtera 36€ pour prendre autant de plaisir que nous en avons eus avec Mauricette. Mise en bouche, une crème Dubarry titillée par une pointe de curry qui lui met les point sur les i grecs. La dame au chapeau vert adoratrice de l’asperge sous toutes ses formes aime les asperges du pays juste rôties, saumon fumé, gel de citron, œuf de truite, vinaigrette au miel. L’idée touche son but dans l’épure précis: 15,5/20. Moi, le jambon à l’os, ma vision du jambon-beurre. Ludique dans l’approche, mini sandwich de tranches de pain grillé au gout de beurre, crème au gout de jambon, saveur d’Apéricube jambon mais en bon voyez? Du végétal utile au débat agrémente: 15/20. L’Asie réalise un tour de passe-passe bluffant avec pavé de dorade roulé dans l’algue nori, court-bouillon miso et soja accompagné de carotte sauce à l’orange où rien n’est laissé au hasard, tout participe, j’ai dit la même chose juste avant mais différemment. 16/20. Le chef compose, enfin il continue à composer avec millefeuille de porc et lard de Colonata, jus de porc framboise, petits pois au naturel, émulsion de cosse de petit pois à la menthe ». Quel culot! Climat fin de printemps avec le vert, saveurs gourmandes de l’association cochon/framboise. Toi aussi ami lecteur, essaye dans ta cuisine. Du casse-gueule intégral pas à la portée de tous les tambouilleurs! Une innovation turbulente, bravo! 15,5/20! Plus aisé d’accéder au sucré avec le biscuit macaron au café, crème mascarpone vanillé, gel café au Cognac et le fraisier, crème chocolat blanc et vanille de Tahiti, cœur citron vert tous deux différents avec des saveurs soutenues apaisées en sucre: 15,5/20.

Une cuisine sophistiquée, très travaillée et presque décalée des considérations consuméristes du XXIème siècle où le calcul cynique est souvent la règle. Matthieu Matheron s’en fout, il fait la cuisine qu’il aime, il y exprime sa grande capacité à régaler. J’aime l’humilité de ce cuisinier, son courage entre les mammouths touristiques Alpilles et Luberon, ses doutes magnifiques et ses plats qui ne cherchent pas le consensus benêt d’une clientèle facile.