Presque tout aura été dit sur l’émission proposée par M6 « Oui, Chef » au moment où vous lirez ça. A nous : cette émission n’est absolument pas représentative de la réalité de la profession. Elle transcrit juste des fantasmes. En bon media de « la société du spectacle », comme d’hab’ la télé ne montre jamais « la » réalité, mais soumet le plus souvent « une » réalité caricaturale et formatée, scénarisée. Pour nous, la réalité, c’est l’existence d’apprentis vus dans les nombreux établissements fréquentés. Voilà des noms :
- Guillaume Argentieri et Laura Guerra,
- Urbain Dubois à Saint-Zacharie (83)
- Bastien Ferri, l’Atalante à Toulon (83)
- Christophe Catalano, Les Acacias à Oraison (04)
- Nuno Peireira et Yohann Acquaviva, Le Tire-Bouchon à Marseille (13)
- Steven Ascione, Le Vieux Four à Mouriès (13)
- Brice Farmache, Auberge des Bannettes à Rousset (13)
- Sophie Bourgeonnier, L’Olivier à Bormes-les-mimosas (83)
…et tous les autres non-cités qui ne passent pas à la télé, mais vivent la réalité de l’apprentissage jour après jour, sans laisser place à un quelconque romantisme trompeur. Un apprenti peut passer ainsi entre plusieurs patrons : des laisser-faire, des autoritaires, les terre-à-terre, les utopistes, les j’m’en foutistes, des pédagos, des débiles mentaux, des amoureux de leur métier, des fondus du tiroir-caisse. Le jeune sera le fruit de ses multiples expériences, aura un « cursus » comme on dit. Cuisine ou salle, bien sûr la discipline et le respect réciproque seront de rigueur. Ainsi, le meilleur moyen de faire la promotion d’un métier abandonné par la jeunesse n’est sans doute pas de montrer à la télé un « chef » branchouille sous-sosie de Pierre Palmade fréquentant le milieu de la nuit parisienne et jacassant ses clichés (« on est une équipe » etc) escorté de la caricature d’un adjudant chef entoqué et paternaliste à qui on la fait pas recruté à la télé pour « en faire baver aux jeunes » (c’est pour ton bien ). Ce qui n’enlève en rien à une éventuelle compétence dans leur domaine professionnel, mais le spectacle et la mise en scène sont absolument pitoyables. Pour terminer, faut savoir que certaines écoles de cuisine de la région PACA affichent un taux de remplissage de seulement 40%. Alors si la télé se met à vouloir fabriquer des cuisiniers comme elle s’évertue à cloner des chanteurs en 6 mois dans le même genre d’émissions, ce seront les asiles psychiatriques qui se rempliront. Mais pas les rangs délaissés du personnel des restaurants.
Olivier Gros