Je viens de lire le livre de Pascal Rémy : »l’inspecteur se met à table ». Personne ne connaît Pascal Rémy. Encore moins le lecteur du BAO. Forcément, il faisait partie de cette police secrète qui s’introduit dans les cuisines sans effraction, avec le consentement craintif du restaurateur pendant 16 ans si l’on en croit l’auteur. S’il se met à table, il révèle aussi qu’un inspecteur en moyenne ne tient pas plus de 5 ans. Que son quota est de dix visites par jour. Pour un seul test ! bizarre, bizarre ! Il lâche le morceau sur ce job de misère qui l’a fait vivre 16 années, petit record dans la maison. C’est un morceau de voile qu’il lève sur ses journées abrutissantes et plus administratives que jubilatoires. Pas de révélations fracassantes en vérité mais on y découvre un guide aux prises avec les mêmes travers, mesquineries, cachotteries et même mensonges de la direction. comme l’énorme bluff du nombre d’inspecteurs. Et par déduction, que neuf tables sur dix ne sont pas testées ! et dire qu’on savait tout ça ! Lire les vieux numéros du BAO. Ce livre s’adresse surtout à ceux qui ont pour le « miche » une vénération quasi religieuse. Pour ceux qui prétendent haut et fort que le « miche » est intouchable comme une église en tant de guerre ! Que les inspecteurs sont des preux chevaliers qui se déguisent en gueux pour ne pas être remarqués. En réalité, les descriptions des collègues de Pascal Rémy ne sont pas reluisantes. Elles tiennent de la caricature d’un fonctionnaire triste, terne et sans imagination. Et pas spécialement plus futé dans le fumet. Alors qu’ils passent pour des grands spécialistes ! des thésards de la chose ! avec une surprise en prime pour les afficionados de la bible, ils notent selon leur humeur, leurs goûts personnels et l’état de leur organisme. Qu’il n’existe aucune école, aucune université pour préparer des inspecteurs. Le goût est une affaire personnelle. Ce que nous expliquons depuis plus d’une décennie. Aucun guide détient le monopole de l objectivité puisque chaque inspecteur a un goût personnel. Voilà un terme inventé pour les crédules. Il va jusqu’à dire qu’il sanctionne parfois pour des raisons étrangères aux prestations. Voilà un comble pour une bible. Même rouge ! A ce propos, l’auteur prend soin de ne jamais citer le « miche ». Précaution oblige. N’oublions pas que lorsqu’on entre au guide, on signe un contrat dans lequel existe une clause stipulant un devoir de réserve qui préserve les secrets d’une maison qui a tant de pouvoir. Si on s’en tient à cette clause, Pascal Rémy est en infraction. Le contrat le contraint à ne rien divulguer ! On ne sait pas bien s’il règle ses comptes ou si la plume le démangeait. Plume remarquable d’ailleurs. Car en réalité c’est plus une attaque en règle contre le peuple des toques que contre le guide lui même. Certes on apprend que certains trois étoiles ne les méritent pas ! qu’un quarteron de chefs est plus puissant que tous les guides réunis ! il cite Veyrat, Bocuse et Ducasse entre autres ! qu’ils sont visités essentiellement par le sommet de la hiérarchie. Que ça se décide en catimini et dans l’ombre et le chuchotis du bureau du plus gradé. Qu’ils sont tenus à l’écart comme vous et moi. Que ces fameux trois étoiles échappent parfois à la visite annuelle. Du BAO quoi ! mais les chefs haussaient les épaules quand ils nous lisaient ! des révélations, il y en a, à toutes les pages. Et des pas piqués des vers comme cette restauratrice de Cassis près des calanques que tout le monde aura reconnu qui lui court après pour essayer de l’acheter. Il nommera le sujet de son animosité, le « guide » au lieu du Michelin. Dans la série vacherie, il n’oubliera pas d’écrire que Claus Banzo du « clos des violettes » est largement surévalué par le guide.
Paul Bianco