Avec Mauricette, on s’est offert une chtite virée à San Rémo, sympatoche ville frontalière, et paf, on choisit de manger al « Ristorante Da Vittorio », une institution locale, y a qu’à voir les murs de la petite salle couverte de photos du patron avec de grandes grandes stars, genre Pavarotti, vous savez le peintre qui a dessiné la Joconde? Ah non j’confonds avec Léonardo di Carpaccio! Qu’est-ce qu’on s’marre au BÀO, bientôt aux grosses têtes! Bref. On en a plein la vue, et on se dit, ici ça doit être du sérieux. Si les artistes sont venus, hein, c’est que ça doit être bon, non ? non, en fait ça nous a incité un peu à la méfiance, mais la simplicité et la décontraction des deux serveurs nous ont vite fait comprendre qu’ici c’est comme à la maison, sauf que c’est meilleur. Le repas se passe merveilleusement bien: spaghetti, antipasti, on s’est rempli la panse et les papilles, un pur moment de bonheur. Fin du repas, l’addition vient : c’est là qu’on rigole! Alors que je sors ma carte bleue, le serveur qui m’avait à l’œil s’invite à notre table, s’asseoit. Echange de regards dubitatifs avec Mauricette. Que nous voulait-il ? Pas ordinaire qu’un serveur, sans prévenir, prenne une chaise et se mette avec vous, on n’a pas élevé les cochons ensemble, quoi? En bon français, tout en s’exprimant avec les mains (ben oui, c’est l’Italie) il m’explique que le midi, il a eu une grande tablée, tous ont payé en carte, et que ça serait bien si je pouvais ne pas régler en CB! Paf! Direct! Sans chichi, naturel quoi! Devant un tel aplomb, mais aussi une telle honnêteté, j’exécute et…règle en espèce. Morale : là où en France, des restaurateurs peu scrupuleux vont s’inventer une panne de la machine à carte bleue, dire qu’ils ne l’acceptent pas alors que c’est affiché sur la devanture, chez Da Vittorio, en Italie, on assume, et on prend pas le client pour un gogo. Il aurait pu mentir, me dire avec cynisme qu’il n’acceptait pas les cartes en tirant la tronche. Après tout nous n’étions « que des touristes ». Non, resto familial jusqu’au bout, pas de tricherie, la vérité rien que la vérité. Je peux vous dire que j’ai bien ri, et que finalement on est prêt à accepter certaines choses pour peu qu’elles soient dites avec sourire et simplicité. Voilà pour la morale de l’histoire, il existe certains lieux où l’on conçoit que le client n’est pas un benêt et qu’il est prêt à jouer le jeu, finalement hein, entre humains, on peut s’comprendre, tous dans la même galère, faut gagner sa vie, payer ses charges, impôts, et tirer son épingle du jeu. Pourvu que l’on ne considère pas le restaurateur comme son larbin, et le client comme un porte-monnaie sur pattes.
Damien
DA VITTORIO
Piazza Bresca 16
SAN REMO