DE QUOI JE ME MÊLE?
Les sorties des guides gastro-comiques nationaux (Michelin et Gault et Millau en tête) en début d’année auront été, comme souvent, sujet à avalanches de commentaires plus ou moins intéressants émanant de la nouvelle sphère des « blogueurs influents » qui gravitent dans le microcosme de la tambouille. Avec pour motivation essentielle –lisible et risible- une obsession maladive du buzz et du nombre de « j’aime » sur leur page Facebook. C’est le monde moderne.
Dans le flot de bavardages, il sera fréquemment chroniqué sur la question des « étoiles refusées » par quelques restaurateurs. Les exemples de rejets des médailles et récompenses les regarde… mais sont de plus en plus fréquents: pression insupportable, investissements trop élevés etc. Toutes les raisons, bonnes ou mauvaises, nourrissent en tous cas le jeu médiatique.
Sauf que je suis abasourdi par certaines analyses de journalistes autoproclamés « libres » qui soutiennent les restaurateurs dissidents. Soit pour se croire plus libre eux-mêmes, soit pour enfoncer le fameux guide rouge dans ses incohérences. Car enfin! Qu’on m’explique en quoi la critique culinaire émise d’un journaliste regarde le restaurateur concerné? Est-ce que je dis au cuisinier ce qu’il doit mettre dans ses ris de veau ou sa soupe de poisson? C’est quoi ce cinéma? Qu’un restaurateur vienne nous dire au BàO ce qu’on doit écrire sur lui! Il va être accueilli! Chacun son métier!
Des médias nationaux (ou pas) ont rapporté avec minutie les états d’âme des toques renégates: « Le patron d’un restaurant belge crédité d’une étoile par le Michelin et d’une cote de 15/20 par son concurrent Gault & Millau a demandé aux deux célèbres guides de ne plus figurer dans leurs prochaines éditions afin de rester « libre dans sa cuisine »*. Même le souvent pertinent Franck Pinay-Rabaroust cabotine sur son site! En titrant « Ces chefs qui auraient dû refuser leur étoile Michelin »**! A aucun moment il ne pose la question de la confusion des genres: si un guide est aux ordres du restaurateur et obtempère, son pavé n’est que com’ et pub! S’il envoie balader le taulier et ses exigences: c’est un guide conçu pour le consommateur de restaurant! Point barre! Michelin, Marianne, la Gazette du chemin de fer ou Okapi: un responsable éditorial digne de ce nom n’a pas à accepter les pressions de qui que ce soit! Non mais! Je veux pas d’étoiles… Je veux pas de toques… M’enfin: de quoi j’me mêle?
Olivier Gros
* http://www.sudouest.fr/2014/03/13/un-restaurateur-etoile-demande-a-etre-retire-du-michelin-1490231-708.php
** http://www.atabula.com/ces-chefs-qui-auraient-du-refuser-leur-etoile-michelin/