LA PROPAGANDE PUBLICITAIRE A REMPLACÉ LA CRITIQUE CULINAIRE
Les guides de restaurants imprimés sur du papier ont traversé le XXème siècle avec leurs lots de magouilles et de copinages même pas dissimulés: leurs ventes ne sont même plus en chute libre! Les éditeurs ont tout bonnement abandonné la version papier. Toujours (un peu) présent dans les linéaires des librairies, on observe parfois le Gault-Millau qui n’est plus un guide depuis longtemps. Au moins depuis qu’il rivalise de sottise éditoriale avec le Petit Futé qui lui, n’a jamais été un guide mais toujours un annuaire publicitaire calqué sur Les Pages Jaunes. Depuis que Le Guide Michelin s’est acoquiné avec TripAdvisor en 2019 dans un « partenariat stratégique international », son virage numérique intégral se confirme. Au détriment de la qualité de l’info donnée, comme tous les supports médias extensifs qui spéculent sur « un volume de visites »: la qualité de l’information est rarement le propos des actionnaires. Tandis que Le Routard (édité par Hachette) joue la diversification papier à l’international, gigote dans son coin en surfant sur l’effet Madeleine de Proust, « c’était mieux avant » dans l’esprit des quinqua-sexa-septuagénaires devenus cadres bancaires qui écoutent Maxime le Forestier dans leur Renault Captur parfumé au désodorisant chimique jasmin, c’est cool le jasmin, ça me rappelle Katmandou avec Martine et Jocelyne et les autres aussi.
Oui, les quotidiens de la PQR (Presse Quotidienne Régionale), magazines et hebdos ont globalement abandonné l’exercice de la critique gastronomique. De toutes façons bien peu de journalistes spécialisés mangeaient dans les restaurants dont ils causaient pourtant en abondance, sauf quand ils étaient rincés gratos. Ces grands professionnels de la critique culinaire depuis recyclés en « chroniqueurs mondains de l’actualité culinaire » préfèrent aujourd’hui entretenir un réseau « d’amis » restaurateurs qui les aiment toujours beaucoup… tant qu’ils ont le pouvoir de publier sur un blog le minois d’un chef qu’ils tutoient sans sourciller. Même si leur pouvoir de scribouillard opportuniste s’est éteint après avoir été dégommés de leurs prérogatives journalistiques au sein des rédactions avides d’optimiser la rentabilité en dégraissant les effectifs. Dégommé le testeur de restaurants « qui coûte trop cher » à l’actionnaire: fallait lui donner un salaire! Vous devez savoir que les journaux préfèrent désormais les stagiaires: ils payent parfois de leurs propres économies leurs repas pris à des fins de parution critique. On veut bien te prendre comme stagiaire non rémunéré pour la chronique culinaire du journal, mais tu payes tes repas. Bref! Un classique du monde professionnel de demain en vente aujourd’hui et si tout va mal, ça ne devrait pas s’arranger de sitôt.
Olivier Gros