Une attaque frontale de notre travail, de la critique gastronomique et des journalistes en général. La sentence est tombée: nous devons obtempérer devant l’ogre Internet et ses représentants autoproclamés. Des brouettes de démagogie à l’égard du chaland « surfeur » dont ils exploitent le désir de reconnaissance, les cyniques du clavier armés de leur propagande acérée sous le masque de l’anodin ne font pourtant qu’entamer les hostilités. Lisez plutôt.
« Quelle est la légitimité d’une rédaction, aussi talentueuse soit elle, pour attribuer de bonnes ou de mauvaise notes aux acteurs de la ville? Comment peut on juger un restaurant en y passant rapidement, aux mieux une fois par an? Comment se faire une idée d’un spectacle ou d’un film avec la critique d’un seul reporter? Pour toutes ces raisons, Cityvox considère que les internautes sont les plus compétents pour donner leurs avis. Notre rôle est de rendre possible leurs contributions, en référençant les lieux, les événements ou l’actualité locale. Mais les commentaires subjectifs sont beaucoup plus riches lorsqu’ils émanent de dizaines d’internautes. »
Extrait lisible sur http://www.cityvox.net/category/cityvox/strategie-cityvox/
Nous étions obligés: enquête sur nos sauveurs de l’humanité consumériste.
DÉPIAUTAGE DE PHILOSOPHIE
DES SITES CITYVOX ET LINTERNAUTE
LES ÉCRANS DE FUMÉE
Dans un de ses fameux sketchs, Coluche s’amusait à détourner un célèbre proverbe en disant « le monde appartient à ceux qui ont des ouvriers qui se lèvent tôt ». Le moins qu’on puisse dire, c’est que des sites Internet comme « Cityvox » ou « L’internaute » ont fait philosophie de travail la boutade.
COMMENT ÇA MARCHE?
Chacun des deux sites offre un grand angle du monde de la consommation grâce à diverses rubriques comme cinéma, jardin, santé, expo, auto, déco, photo…et restos! Le jeu est de faire participer le consommateur en lui offrant un espace d’expression où il inscrit ses avis. Mais le pari est de lui faire croire qu’il a de l’importance puisqu’il s’exprime. Du coup, il bosse. Un immense forum si vous préférez. D’un côté, ce consommateur qui diffuse ses commentaires sur les restaurants ne coûte rien au site Internet puisqu’il se contente de faire reflet des propos. De l’autre côté, des équipes de commerciaux se chargent de vendre de la pub sur ses mêmes sites. Pub qui de fait sera compulsée par celui qui donne son avis sur les choses de sa vie. Bien joué Amédée, la boucle est bouclée. On sait trop bien que la lucarne Internet n’est pas simplement le reflet du monde, mais aussi et trop souvent l’objet de marchands avisés qui naviguent sur des opportunités de marchés où l’éthique est en toc. Notez que Cityvox est filiale d’Orange depuis 2008: « sa croissance s’inscrit dans le développement d’Orange sur le marché de l’audience et de la publicité en ligne ». Vous voulez un dessin?
MAIS ALORS: OÙ EST LE PROBLÈME?
Tout n’est pas transparent. Essayez de déposer une critique sur un restaurant chez ces deux-là pour voir! On l’a fait! On a les preuves! On sait de quoi on cause! Si vous écrivez être « venu dans ce restaurant grâce au Bouche à Oreille » et sauf pour de trop rares exceptions, le message entier ne passera pas! En clair: pas question de causer du BàO dans Linternaute et Cityvox! On doit gêner aux entournures! Essayez vous-même et vous verrez! Autrement dit, non seulement les messages sur les restaurants sont filtrés, mais quand ils passent les mailles du filet, ils sont modifiés! Ya distorsion flagrante du propos! Rien de pire que la distorsion du propos! C’est pire que la rétention totale de l’info! On croit que c’est du Champagne et c’est du mousseux! Du chocolat Valrhona et c’est du Benco! J’aime bien le Benco! Mais faut pas faire croire que c’est du Valrhona! Mensonge donc quand il est dit que « Cityvox considère que les internautes sont les plus compétents pour donner leurs avis ». Pourquoi leurs avis sont-ils falsifiés alors? Attendez! C’est pas fini!
DES RESTAURATEURS QUI CRITIQUENT… EUX-MÊMES!
Des restaurateurs finauds du clavier azerty se font passer pour des clients lambda et déposent allègrement des commentaires élogieux sur leur propre restaurant… et allument la boutique du cuisinier voisin! On n’est jamais mieux servi que par soi-même! Y compris dans la critique! Souvent d’ailleurs, ceux-là n’aiment pas le BàO! Devinez pourquoi? Bref! Ce genre de site n’est que du leurre en barre! Et qu’on ne vienne pas me dire que ce sont des guides! Si leur succès va grandissant, c’est peut-être de la faute des guides « traditionnels » (et conventionnels) qui n’ont cesse de se tirer des balles dans le pied en affichant leur inaptitude à se caler dans la réalité du moment! La nature a horreur du vide!
Le plus amer dans ce triste constat, c’est que la plupart des journalistes et en particulier ceux de la famille « gastronomique » ne mouftent pas, trop poltrons de s’afficher contre des supports qui par le jeu de la curiosité croisée de l’internaute génèrent parfois sur leur propre site une quantité non négligeable de visites. Il est vrai que parmi cette escouade de décrypteurs du microcosme la tambouille, aucun n’aspire au prix Albert Londres.
Olivier Gros