On savait que le Miche, le grand Miche, l’inébranlable Miche n’était pas parfait, en tout cas pas aussi sérieux que les intégristes de la restauration voulaient le laisser croire, mais de là à se permettre des bévues pareilles y a un grand pas qu’on n’osait pas franchir. Et pourtant, cette bévue monumentale, ils l’ont commise, prouvant par là même qu’ils trichent et qu’ils ne testent pas toutes leurs tables, ce que nous rabachons depuis quinze ans. S’ils l’ont fait à Ostende, on peut penser légitimement qu’ils le font dans d’autres pays. Mais le lecteur s’en fout, il veut du rouge, du sérieux, du prestige et un nom, un nom qui sonne bien à ses oreilles et qui passe au 20 heures. Quand on passe au 20 heures, c’est un peu la consécration et la preuve du talent et du travail sérieux. Et question télé le Miche s’y entend ! D’ailleurs on n’entend que lui ! faut dire que les autres, c’est pire ! Je veux dire par là que le Miche est le moins bidon de tous les bidons! Ou le plus sérieux des moins sérieux comme le go et millo, à qui il est arrivé la même mésavanture il y a quelques années. Un restaurant était référencé par le guide alors qu’il n’était toujours pas ouvert à la sortie du guide. On aurait voulu détruire ce qu’il reste d’une image qu’on ne s’y serait pas pris autrement. En fait, on vit, on pense, on jauge, on juge, on note par le petit écran, comme si c’était la panacée universelle, la référence absolue ou cet examinateur juste et impartial qui décide de vos compétences ou de vos talents. Vous connaissez un chanteur vous qui a la cote auprès du peuple qui est connu et reconnu sans passer à la télé ? C’est la télé ou le néant. Regardez, même une star comme Alain Delon se sert de la télé ! Pourtant Dieu sait qu’il peut s’en passer avec son statut de star universelle. Et si un apprenti vedette veut signer des autographes, il a intérêt à entrer dans la petite lucarne. Tout ça pour vous dire que le Miche, c’est un peu la même chose, c’est la télé du monde gastronomique, si vous ne passez pas dans ses colonnes, vous risquez de glander longtemps dans votre trou, sans la moindre reconnaissance de votre talent. C’est un peu Ubu au pays des casseroles avec l’assentiment des restaurateurs et des lecteurs.
Paul Bianco