On croyait tout savoir et avoir tout dit sur les pratiques du monde de la restauration et des chefs ! On était loin du compte ! Après avoir lu « Food business », d’Olivier Morteau, on en reste encore éberlué. Certes, le livre enfonce des portes ouvertes, déjà poussées depuis longtemps par le BaO comme la subjectivité d’une critique. Chez nous, l’objectivité ressemble à un leurre dont les bonnes consciences se gargarisent. Faut redevenir un peu sériéux, un être humain, serait-ce même un journaliste, raisonne, écrit avec ses tripes, son coeur, son palais, ses allergies, ses préférences, ses phobies, ses penchants et la suite. Après ça, on voudrait qu’il soit objectif. On aurait tort de le prendre pour un robot à penser juste ! Et de surcroît, personne ne peut se prévaloir d’avoir un avis intemporel ! donc, la critique ne sera qu’un instantané, qu’une photo qui, en aucun cas ne représentera la globalité des prestations de l’établissement. Si on devait aller dans le sens d’un trois étoiles qui déclare sans broncher : « On ne juge pas sur un repas », on pourrait déduire qu’aucune critique, aucun guide ne serait concevable car il faudrait tester tout l’année le même restaurant avec ses hauts et ses bas, ses irrégularités et ses nouvelles cartes. De l’utopie purement corporatiste. Redevenons sérieux ! Le client lui n’a pas a subir tous ces aléas, il paie une prestation, au restaurateur de lui donner le change, et de mettre tout en oeuvre pour qu’il soit au top. En allant au bout du raisonnement, un guide même consciencieux, qui teste toutes les tables ne peut-être que partiel, partial, subjectif, incomplet et injuste. Il ne peut et n’a pour vocation que s’approcher de la vérité. Et encore cette vérité n’est pas la même pout tout le monde. Alors, arrêtons de nous faire du cinéma avec des mots, de belles phrases car nous n’atteindrons jamais ce qu’attend notre lecteur; Il ne trouvera jamais ce que nous avons ressenti un certain jour, celui du test, où la pluie était de la partie, l’euphorie exempte car on venait d’apprendre que l’oncle Marcel venait de décéder alors que pour lui tout baignait et de plus sous un soleil éclatant. Ou vice versa. Bien sûr que l’assiette reste l’assiette mais il est indéniable que certain facteur extérieur qu’on trimballe avec soi joue un rôle déterminant dans nos appréciations. Au BAO, nous sommes conscients de tous ces épiphénomènes. Pour toutes ces raisons nous nous tenons à la disposition d’un restaurateur qui aurait subi quelques mauvaises critiques pour le retester, s’il le désire. Saluons tout de même au passage le livre d’Olivier Morteau qui possède deux qualités essentielles pour nous : il est fort bien écrit et surtout extraordinairement documenté. On a le sentiment qu’il a travaillé dans bon nombre de médias cités dans son livre, qu’il a potassé son sujet et qu’enfin si on venait à le démasquer, il aurait tout comme au BAO, un certain nombre d’amis comme les tigres du Bengale, en voie de disparition.
Paul Bianco