ATABULA
OU LES INDIGNATIONS SELECTIVES
Pour le « grand public » qui en ignore à peu près tout « Atabula est un journal d’information et d’opinion numérique (pure player) indépendant. Il a été créé en janvier 2010. Fondé et dirigé par Franck Pinay-Rabaroust, journaliste et ancien rédacteur pour le guide Michelin, le site a pour objectif d’informer, de décrypter, d’identifier les nouvelles tendances et de susciter la curiosité sur tous les sujets en lien avec la gastronomie et l’alimentation. »(1)
Nous-autres du « Bouche à Oreille », on le lit plutôt régulièrement. Et même si on observe une baisse de la qualité du contenu notamment pour cause de course au volume d’articles -qui cache généralement une obsession du référencement Google et du partage sur les réseaux sociaux- on ne boude pas notre plaisir quand sont (gentiment) égratignés quelques chefs, relatés (avec mondanités) quelques péripéties du monde de la sauce parisienne et un peu autour quand même, et parfois dénoncés (timidement) des produits comme le coca-cola (2).
Seulement voilà. L’impertinence ne s’accommode pas de demi-mesure. Sinon, ça boite du propos, ça sonne faux. Avec un œil critique un peu exercé sur la presse en général, on décrypte tôt que les coups de gueule d’Atabula exonèrent tous ses « partenaire-annonceur »(3) financeurs du site. Bien compréhensible après tout, mais de là à jouer les moralisateurs impertinents alors même qu’on est tenu en laisse, c’est le caniche qui se prend pour un pitbull.
Récemment quand le thème fut relayé par les médias, nous avons compris que le géant Lactalis engrangeait de considérables marges sur le dos des producteurs de lait. Avez-vous entendu ou lu nos « Don Quichotte et Sancho Panza » de la blogosphère saucière, le taulier d’Atabula Franck Pinay-Rabaroust et son second-couteau plumitif diplômé HESSEC Ezéchiel Zérah, sur ce scandale Lactalis? Et pour cause! « On ne mord pas la main de celui qui vous nourrit » selon le dicton: « Fromages & Chefs » est une marque du groupe Lactalis… « partenaire » d’Atabula (3). Forcément que dénoncer dans ces conditions serait un peu ballot pour le tiroir-caisse de la boutique Atabula. J’entends d’ici la musique rhétorique « on est libre de parler ou pas de ce qu’on veut, et personne ne nous dicte notre ligne éditoriale ». Survient généralement dans la foulée le mot « déontologie ». Poufpouf.
Tout autant qu’il serait très compliqué pour Atabula de dénoncer « Nespresso » avec autant de ferveur qu’il dénonce le Coca-Cola dans les restaurants (2). Car si la firme de la fameuse boisson américaine n’est pas « partenaire » d’Atabula, Nespresso l’est. Comme Nestlé en général! Propriétaire de Vittel et Perrier… également sponsors d’Atabula! Quant à la marque Bridor considérée par les professionnels de la restauration comme « le Coca-Cola du pain », elle n’a rien à craindre de notre duo chapi-chapo d’Atabula! Une éventuelle charge sur les colorants ou conservateurs contenus dans leurs produits industriels est illusoire. Bridor sponsor: si tu l’attaques, il te mord.
Comparativement et par son absence de cynisme, le bien connu journal des pros « Le Journal de l’Hôtellerie-Restauration » affiche la décence de ne laisser aucun doute planer sur son ambition de soutien à l’industrie agro-alimentaire en promotionnant à coups de « copier-coller » les dossiers de presse des produits d’usine reçus au quotidien dans sa boite mail. Pas de ça chez Atabula: trop vulgaire. Mais on sournoise le pif en l’air en respirant l’air du temps, en tournant autour du pot, ménageant la chèvre et le chou dans de savants calculs tactiques. Les faux-impertinents, les valeureux d’opérette aux indignations sélectives: le pire à la botte des côtés en bourse.
Avril 2014: je pensais Franck Pinay-Rabaroust bien lancé dans un combat contre « la violence en cuisine » qu’il dénonçait (4). Allant même à se poser en fer de lance médiatique sur la question. J’y suis même allé de ma larme d’indécrottable romantique. Mais depuis: plus rien. De là à penser que Robuchon et Ducasse, parrains de la profession avec qui il ne faut pas se fâcher aient fait pression amicale, ya pas loin. Sur ce point, Atabula ne fait pas cavalier seul: la quasi intégralité de la blogosphère liée aux restaurants est courbée devant les deux compères. Seuls ont les coudées franches ceux qui les épinglent sans ambigüité: ils sont rares.
Bonus: en septembre 2016, Franck Pinay-Rabaroust fait paraitre une « lettre ouverte » de forme pétitionnaire (5) dénonçant avec le ton idéaliste d’un adolescent pré-pubère -j’aime pas la guerre, l’argent c’est méchant- le récent rachat de Monsanto par Bayer. Qui est pour la guerre? Bref! A défaut d’abattre sans sommation les chimistes, le buzz relayée par les réseaux sociaux aura au moins la qualité de raffermir la crédibilité bien malmenée du site Atabula. C’est bon pour l’image. Ah! Bayer-Monsanto ne sont pas encore sponsors d’Atabula: dépêchez-vous de signer cette pétition tant qu’il est temps.
Olivier Gros
(1) http://www.atabula.com/a-propos-databula/
(2) http://www.atabula.com/restaurant-coca-cola-interdit/
(3) http://www.atabula.com/publicite-et-partenariats/
(4) http://www.atabula.com/violences-en-cuisine-que-lomerta-cesse/
(5) http://www.atabula.com/lettre-ouverte-agrochimie-bayer-monsanto/