Feu sur Sammut tout azimut !
Nous ressentons parfois une toute relative sensation d’isolement dans le paysage national de la critique gastronomique. Je veux parler de celle de « la presse » habituelle. C’est que la profession de critique n’est ni facile, ni confortable. Et ne se confine pas au tartinage d’éloges. Beaucoup de confrères faux-frères excellent dans l’exercice, laissons leurre. De notre point de vue, le salut viendrait peut-être de la Suisse. Car voilà : « la Tribune de Genève », gros tirage chez nos voisins helvêtes, montre d’une certaine façon l’exemple à nos journaux régionaux « bien de chez nous », plus enclins à prodiguer des politesses courtoises que prompts à informer le lecteur. En point de mire du numéro du 4-5 Août 2001, on peut lire ce titre concernant la célèbre étoilée Michelin : « la cuisine de Reine Sammut manque vraiment de rigueur ». Reine Sammut, de La Fenière à Lourmarin. Plus exactement sise à Cadenet, mais Lourmarin sur la carte de visite, c’est sûrement plus classe. Bref, la suite : « la médiatisation n’est pas obligatoirement synonyme d’excellence », « Moins de vent autour des tables et plus d’intérêt pour la cuisine ne serait pas un luxe ». Question assiette, la journaliste met les pieds dans le plat : « velouté de petits pois sans goût », « foie gras trop sucré, écoeurant », « les salades pas assaisonnées », « salade incongrue », « parfum de truffe inexistant », et j’en passe comme « gâteaux orientaux trop sucrés et pâteux : on en trouve de meilleurs au kebab de la rue de Berne » et même pour conclure « elle ne daigne pas quitter ses connaissances pour dire au revoir aux clients ». Sur la même page, mais dans un autre registre, un alignage en règle des « Maîtres cuisiniers de France » : « beaucoup n’ont aucun talent » et « (ils) restent de terribles machos terrés derrière des préceptes d’un autre âge ». Et ben, ça rigole pas. Enfin si : nous, on ne s’en lasse pas. Reste quand même à vérifier que la rédaction de « la Tribune de Genève » soit aussi preste à dégainer le verbe quand elle est confrontée à la gastronomie suisse. Ce qui serait la moindre des choses…
Olivier Gros