LE ONZE

Le Onze restaurant Le Lavandou – L’estanco mignon défie avec panache les lois marketing imposées par le registre balnéaire de la ville, cherche la bagarre avec la statistique: on n’a pas idée de s’enticher d’un tel lieu à deux pas de l’eau mais qui lui tourne le dos, à proximité des bagnoles. Seulement voilà. La récente repreneuse de l’endroit (ex Le Pasta) a bien pigé que si tu veux que les gens t’aiment, faut donner et éviter de les prendre pour des dindons, donner son cœur, un peu de sentiment, faire du propret dans la gamelle pour alpaguer des clients à l’année.

Figurez-vous amis lecteurs que ça marche. Profil de clientèle en terrasse: chaussures de sécurité en pause-déjeuner ou claquettes-casquette de fin d’été. Tandis que les copines préfèrent la petite salle cosy bien repensée. La jeune femme plein d’entrain fait le service, une pile souriante sans chichi, elle est seule en salle alors pas le temps: ya du monde! Dommage que point de vue cuisine, rien ne fasse grimper aux rideaux. Plat du jour 12€ les midi en semaine, 3 salades dont la César que j’ai vu passer avec son poulet pané décongelé, 3 viandes tartare/burger/bavette de 16€ à 20€, encornet et seiches en persillade, des tapas 18€… je reste sur le plat du jour non par envie mais par manque d’excitation sur le choix: poulet sauce forestière. Arrivés en 2 minutes plume en main. Les bouts de poulet vaguement poêlés nagent dans une abondante crème avec du champignon de Paris émincé. Rien d’autre ne nage. L’absence de fond de veau en poudre est un excellent point puisque j’ai envie de voir les points positifs. Servi avec des linguines. 13/20 et 12€ donc. Dessert à 8€ (moelleux chocolat) et 10€ (brioche perdue au rhum). Quand même. L’adorable patronne-serveuse n’est pas du genre à tourner autour du pot. Pas de dessert du jour ce midi (6€), elle m’avoue que les desserts ne sont pas faits ici. C’est aussi honnête que dommage. Alors un café siouplé.

Pour conclure les copains, dans ce nouveau port entre restaurants prétentieux qui se branluchent le goujon et pièges à touristes qui vous pigeonnent le crapaud, je dis qu’il ne manque qu’une cuisine un peu plus ambitieuse qui s’extirpe du strict alimentaire dans lequel cette fort amicale maison évolue. D’autant que le chef semble savoir des choses. D’ailleurs que je vous narre. Je vais payer au bar et là, un type équipé d’une tête aux joues roses qui aime manger vient faire la bise au cuisinier qui lui glisse avec un air de contrebande: « viens demain, je fais des rognons ». Que j’ai donc loupé. Pfff…