LA MAISON DE JULIE

La Maison de Julie restaurant La Môle – Déjà, au téléphone pour la réservation, je sens que je dérange. In situ accueil de frigo de la serveuse. Cadre champêtre, esprit fermier bucolique. Sur le même terrain 50 mètres derrière, un tracteur-pelleteuse déracine bruyamment des bambous pendant le service. Comme je ne vois pas l’intérêt de m’emboucaner les esgourdes avec une odeur de gasoil en prime pendant le repas en terrasse, je demande pour déjeuner à l’intérieur qui est charmant: « non, on ne sert pas à l’intérieur ». Boum. Ça doit être le même ressenti que lorsque la BAC vous fouille les poches mains sur le capot et que vous n’avez rien à vous reprocher.

On n’a pas idée d’autant de froideur dans une aussi jolie maisonnette avec chiens, oiseaux et canards. Le client gonfle, il ne sert qu’à payer, on est chez nous, on va pas nous dire ce qu’il faut faire. De clients justement, nous sommes uniquement 3. Ce qui est un début d’explication. La serveuse acariâtre amène l’ardoise. Menu 34€ et rien d’autre. Chérot pour un repas du midi à la ferme. Avec mes yeux de vieux teckel usé par une vie qui ne m’aura rien épargné, je lui demande si une formule existe. Debout devant ma table, elle répond « oui » puis plus rien. Rien n’est écrit, faudrait deviner. Donc? Long silence, encore… Elle finit par me dire « 22€ ». Si le pigeon de client ne demande pas, on l’empale. Et puis vous comprenez à La Môle, on n’est pas loin de Saint-Tropez et des touristes même qu’on a un aéroport pour les VIP alors si les mesquins du larfeuille comme vous pouvaient passer leur chemin, ça nous ferait plus de place pour les autres! Bref! 22€ la formule tirée du menu 34€. Avec ce midi une mise en bouche balancée sans explication. J’ai bien deviné qu’il s’agit de deux beignets de fleur de courgette lourdingue et farineux. 12/20. Suit l’unique possibilité d’entrée burger de noix de St-Jacques, roquette du jardin. Une seconde mise en bouche. Un micro-burger de 5 centimètres de diamètre, pain façon brioche sucrée (beurk) qui s’auto-détruit quand tu le choppes, sésame noir sur le chapeau. Les gens aiment le sésame noir, comprenez-vous. Dedans, deux spécimens modèles réduits de St-Jacques sans corail dites « US » dans le jargon des cuisiniers, pas la pire. Un peu de lard fumé crémé. Le meilleur est la roquette du jardin, tonique. 11/20. J’ai faim. Vivement la suite. La voici: thon mi-cuit, spaghetti de courgette du jardin. La cuisson appliquée ne peut pas mieux faire avec ce type de thon blanc filandreux, avec du sésame noir dessus. Les gens aiment le sésame noir, comprenez-vous. Steak posé sur un tas de spaghetti: pâtes et courgette. Quel intérêt de servir une courgette du jardin dans de telles conditions huileuses? Ça baigne, ne sert qu’à tacher la chemise quand tu boulottes. Les badigoinces saturées de gras, on ne finit pas l’assiette. 11/20. D’après mes calculs savants, grâce à la formule 22€ le dessert évité vaut 12€.

Je serais curieux de savoir ce qu’on peut servir comme dessert à 12€ dans un camping à la ferme avec un tractopelle qui mouline en fond de jeu. Un camping même pas sympathique. La jeune patronne en cuisine n’a pas salué, ni souri de tout le repas. Ah tiens? En partant j’ai toutefois bénéficié d’un timide salut un peu forcé de sa part. Était-elle ravie que parte enfin le client exigeant? Non mais dans quel monde vit-on? Bref! Prestation très Môle.