UNE JOURNÉE PARTICULIÈRE
15 juillet 2019. 7h du matin et je fixe le plafond de ma chambre éclairée par les moineaux qui gazouillent tandis que chante déjà le soleil. Comme un pressentiment, une envie raisonnée de rester couché. Rythme soutenu d’un repas par jour (au moins) assorti d’une rédaction du constat augmenté des 50000 kms annuels en bagnole, c’est vrai quoi, un jour d’oisiveté, un seul: 24h de flemme ne vont pas plomber le bilan non?
Mon profond sens du devoir et des responsabilités prend pourtant le dessus. Chaussettes, café, écriture et paperasse puis vers 11h, clés de contact. Direction 100 kms: La Motte-en-Provence (83). L’excellent « La Bohème »: restaurant ouvert le lundi midi et soir. Exceptionnellement fermé ce jour. Bon. Les plans B ne manquent pas. Je file au village voisin, Trans-en-Provence (83). Parking éloigné du restaurant visé au centre-village « Bistro Pastis ». Petite marche obligée sous des nuages gris foncé qui s’amoncellent et sentent l’orage. Et là d’un coup mes petits bigorneaux, je me suis pris une trombe sur le pif quelque chose de mastoc, alors même qu’on se crame la couenne depuis 3 semaines. C’est quand même pas de pot. Sérieuse giboulée qui une fois passée, devait me faire ressembler à une chouette sortie de la piscine chaussée de mocassins à glands (plouch-plouch) et fagoté d’une chemise en coton bleu trempée qui colle à la peau comme un juste-au-corps de ballerine.
Arrivé devant le restaurant, la demoiselle me scrute de haut en bas: « on n’a plus rien à servir, désolé, hier soir on a fait beaucoup de clients ». Avec 6 entrées et 14 plats à l’ardoise, plus rien à servir. Hier c’était dimanche et feu d’artifice du 14 juillet. Mais le lundi 15 les fournisseurs de restaurants travaillent. Mais ne livrent donc pas Trans-en-Provence. A moins qu’ici ils n’acceptent pas les chouettes. Enfin bon.
Les bras ballants, enfin les ailes de chouette humides avec ma sacoche que j’ai eu la bonne idée de prendre en faux-cuir véritable ce qui la rend étanche, je retourne sur mes pas. Et je passe devant un bar-restaurant « Le Renouveau » visiblement repris récemment, ça s’appellera « Ti Bistro » bientôt. Spécialités créoles à l’ardoise, j’entre. Rien à perdre au point où j’en suis. Pas bon, trop cher pour un snack amélioré vu le niveau de cuisine et désormais classé « médiocre » dans Le Bouche à Oreille. Quand ça veut pas, ça veut pas.
Sur le retour, vu la poisse du jour et la quantité considérable de kilomètres au compteur de mon véhicule, j’ai pris la route en évitant l’autoroute, on sait jamais. Sur 100 bornes, il peut se passer tant de choses. Curieusement je n’ai percuté aucun sanglier, aucun piéton suicidaire ne s’est jeté sous mes roues, à ma connaissance pas pris de PV, je n’ai pas crevé, et une fois arrivé, dans la boite aux lettres je n’avais pas reçu de notification de contrôle URSSAF, juste la confirmation que mes frais bancaires augmenteront cette année encore comme chaque année, « c’est normal » puisque le prix de tout ce qui est obligatoire dans nos vies augmente. Faite l’inventaire et on en rediscute un jour. Mais passons.
Lundi 15 juillet 2019: j’aurais dû rester couché, ce matin.
Olivier Gros